- par Aisha Stacey (© 2018 IslamReligion.com)
Description: Comment l’islam s’est étendu de l’Arabie, par la Route de la Soie, jusqu’en Chine et en Extrême-Orient.
Bien que la propagation de l’islam au Moyen-Orient ait souvent été accompagnée de conflits, ce ne fut pas le cas en Chine ni en Asie du Sud-Est.
Dans cette partie du monde, l’islam s’est installé petit à petit, par l’intermédiaire des hommes d’affaires qui empruntaient des routes commerciales bien connues. On raconte que le premier musulman ayant visité la Chine aurait été Sa’d ibn Abi Waqqas, un oncle du prophète Mohammed (que la paix et les bénédictions de Dieu soient sur lui). Il serait arrivé à Canton (Guangzhou) en 627 de notre ère. En 651, il visita la Chine pour une troisième fois afin d’y établir une ambassade. L’empereur Gaozong, de la dynastie Tang, le reçut et ordonna la construction de la mosquée Huaisheng, à Canton. C’est ainsi que Canton devint l’une des premières colonies musulmanes de Chine.
Les premiers marchands arabes à atteindre la Chine avaient voyagé par la Route de la Soie (celle du Sud), une route maritime permettant aux gens de croiser de nombreuses idées et personnes différentes. Bien que les historiens occidentaux n’arrivent pas à se mettre d’accord sur le moment précis où l’islam apparut en Chine, il est certain que le prophète Mohammed et ses compagnons avaient à tout le moins entendu parler de la Chine et des Chinois, car il y avait régulièrement des gens ayant voyagé de par le monde qui passaient par l’Arabie et qui racontaient leurs périples.
Plus au Nord, le long de la Route de la Soie centrale, qui allait du Moyen-Orient à la Chine en passant par Samarcande, Kachgar et Xi’an, des échanges similaires avaient lieu. Plusieurs des musulmans qui visitèrent la Chine s’y installèrent et épousèrent des femmes locales. Puis, des siècles plus tard, de nombreux musulmans émigrèrent en Chine durant la dynastie Yuan (1279-1368), quand des populations entières se déplacèrent à travers le vaste empire mongol.
De nos jours, bien que les musulmans ne composent que deux pourcents de la population chinoise, ils sont plus de 20 millions dans ce pays. Dix des 55 minorités ethniques reconnues, en Chine, sont musulmanes. Selon les chiffres gouvernementaux, il y a 35 000 lieux d’adoration musulmans et 45 000 imams en Chine.[1] Mais même après 1400 ans de présence dans ce pays, les musulmans de descendance chinoise doivent encore justifier leur dévotion à un Dieu unique.
En Asie du Sud-Est, composée des pays situés au Sud de la Chine (Est de l’Inde, Ouest de la Nouvelle-Guinée et Nord de l’Australie), l’islam est la religion la plus pratiquée, avec plus de 240 000 fidèles. Comment est-il parvenu jusqu’en Indonésie et en Malaisie? Par les commerçants arabes. L’Indonésie compte maintenant 88% de musulmans et la Malaisie, 61,3%.[2]
Répartie sur une chaîne de 17 à 18 mille îles, l’Indonésie est sise entre l’Asie et l’Australie. Elle abrite la plus grande population musulmane au monde et constitue la plus forte économie de l’Asie du Sud-Est. 922 de ses îles sont habitées en permanence. Sa position géographique stratégique a facilité le commerce international, qui a profondément façonné son histoire.
Selon des récits rapportés par le califat abbasside, l’archipel indonésien était bien connu des marins musulmans grâce à son abondance d’épices précieuses comme la muscade, le clou de girofle et le galangal (gingembre asiatique). Les commerçants arabes y étaient déjà installés dès le 13e siècle et la pierre tombale de Sultan Malik al-Saleh, datée de 1297, indique l’une des plus vieilles tombes abritant un musulman dans ce pays.[3] Le premier dirigeant de Samudra, un état de Sumatra, était musulman. Par ailleurs, le fameux voyageur Marco Polo s’est arrêté au nord de Sumatra, sur son chemin de retour vers l’Europe, en 1292.[4] Il y a visité une ville islamique appelée Perlak. Le grand voyageur arabe Ibn Battuta a visité la même ville en 1345-46 et a écrit que son monarque était un musulman sunnite.[5]
L’islam est apparu petit à petit, dans les îles indonésiennes, de deux façons : par les indigènes se convertissant à cette religion et par les musulmans étrangers, la plupart originaires de l’Inde, de la Chine et du Moyen-Orient, venus s’installer dans l’île. Ces étrangers ne cherchèrent pas à imposer leurs croyances aux populations locales; ils adoptèrent plutôt les coutumes locales, tout en informant les gens sur l’unicité de Dieu et sur les lois de la Shari’ah. Souvent, quand les locaux décidaient d’embrasser l’islam, ils s’efforçaient de convaincre leurs familles, amis et voisins de faire de même.
Un intérêt particulier devrait être porté à Aceh et au Sultan Iskandar Mouda (1607–1636), le douzième sultan d’Aceh, qui a apporté beaucoup de pouvoir à ce royaume et qui a initié les premiers contacts avec l’empire ottoman.[6] Dans la première moitié du 17e siècle, Aceh fut la puissance économique et politique dominante de la région. Elle contrôlait la partie nord de la Péninsule malaise, de même que les parties nord et centrale de Sumatra.[7]
Tout l’archipel malais était alors connu sous le nom de Malaisie. Mais ces territoires, colonisés par les Britanniques, furent réduit, à la fin du 19e et au début du 20e siècle. En 1963, des parties de la Malaisie, à l’Est et à l’Ouest, devinrent un seul pays. La partie ouest commence à la frontière avec la Thaïlande et va jusqu’à l’île de Singapour et est sise sur la pointe sud de la péninsule malaise. Les territoires de Sabah et Sarawak, séparés par Brunei, au nord de Bornéo, constituent la partie est.[8]
La Malaisie renferme de nombreuses ressources naturelles telles l’étain, le camphre, l’ébène et l’or.[9] C’est pourquoi, depuis des siècles, des navires ont utilisé la côte de la péninsule pour ce commerce. Le commerce sur le détroit de Malacca a aidé au développement de liens entre la Chine, l’Inde et le Moyen-Orient et c’est ainsi que l’islam est apparu au sein de l’archipel. Ce fut ce qu’on peut appeler une conquête pacifique.
Le nom Malacca vient du mot arabe Malakut. Un poste de traite arabe fut établi, au 8e siècle, et l’islam se répandit dans la péninsule malaise comme il l’avait fait en Indonésie.
Quand les Espagnols et les Portugais arrivèrent au début du 16e siècle, l’islam était déjà fermement établi en Asie du Sud-Est. Il continua de se développer au 17e siècle, quand des commerçants et des intellectuels arabes émigrèrent dans la région. Les puissances européennes, ou les compagnies les représentant, commencèrent à envahir la région et à s’imposer dans les vies économique et politique. En dépit de ce colonialisme, dès le 19e siècle, l’Asie du Sud-Est parvint à s’imposer comme partie importante du monde musulman.
NOTE DE BAS DE PAGE:
[1]La politique religieuse de Chine: https://www.muslim2china.com/MuslimInfo/Religious-Policy-of-China.html
[2]Population musulmane de l’Indonésie. Pew Research Centre.
http://www.pewforum.org/2010/11/04/muslim-population-of-indonesia/
Profils démographiques de Malaisie 2018 – IndexMundi
https://www.indexmundi.com/malaysia/demographics_profile.html[3]L’ancienne Asie du Sud-Est. John Norman Miksic & Goh Geok Yian Taylor & Francis, 2016 p497
[5]Indonesia – THE COMING OF ISLAM – Country Studies
http://countrystudies.us/indonesia/5.htm[6]Architecture et politiques identitaires d’Indonésie. Izziah Hasan 2009
https://digital.library.adelaide.edu.au/dspace/bitstream/2440/65554/8/02whole.pdf[7]L’islam en Asie du Sud-Est. P 21
https://www.encyclopedia.com/environment/encyclopedias-almanacs-transcripts-and-maps/islam-islam-southeast-asia[8]Pays et cultures. http://www.everyculture.com/Ja-Ma/Malaysia.html